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Aux sources de la prospérité américaine

par Arthur Laffer

Pour commencer, la première phrase mélange les métaphores
Reaganomics et courbe de Laffer
Comptabilité du déficit
Comptabilité courante ou consolidée ?
Inflation et dette publique
Appréciation des actifs des administrations
Réduction des engagements fédéraux non garantis
Impôts, déficits, éviction et production
Taux d'intérêt réels
Epargne et investissement


Il y a quinze ans, les taux marginaux d'imposition et la progressivité du système fiscal ont été drastiquement réduits. Certains ont soutenu que ces politiques stimuleraient la croissance économique à un tel point que les recettes engendrées augmenteraient réellement. Les résultats de cette expérience constituent un record : non seulement cette augmentation ne s'est pas produite, mais la dette publique a quadruplé dans l'espace d'une douzaine d'années » (Rapport Economique au Président, p. 38).

Pour commencer, la première phrase mélange les métaphores.

On ne peut pas s'appuyer sur une hausse de la dette publique pour démontrer que la baisse des taux n'a pas augmenté les rentrées fiscales. On devrait plutôt relier les changements dans les rentrées fiscales aux changements de taux, puisque c'est de cela qu'il s'agit dans ma courbe. Comme il est indiqué dans le même rapport au Président, la baisse des impôts de Reagan s'est accompagnée d'un accroissement des rentrées fiscales « de l'ensemble des administrations » de l'ordre de 670,6 milliards de $, soit de 69 %, ce qui correspond à un taux annuel de plus de 7 %. Devant ce fait, il semblerait bien que tout cela ressemble étrangement une « hausse effective des rentrées fiscales », même si on les définit à la manière des Conseillers du Président !

Reaganomics et courbe de Laffer

En termes réels on a constaté de substantielles augmentations des recettes fiscales. Ainsi de 1982 à 1989 les recettes fiscales réelles ont augmenté de plus de 40 %. Il est évident que la prise en compte de l'inflation ne permet pas aux économistes du Président de se tirer d'affaire. De quel côté pourrait-on se retourner pour rendre quelque crédibilité à leur rapport ?

Soit : admettons qu'ils aient voulu dire que la part des recettes fiscales par rapport, la production nationale a diminué. Je me demande pourquoi c'était si difficile pour eux de l'écrire simplement ; mais s'ils l'avaient fait, ils ne pouvaient plus justifier leur position, d'autant plus que quarante et une page après le commentaire ci-dessus, ils énoncent dans leur rapport que : « Contrairement à ce qui a été dit, les impôts perçus à tous les niveaux de l'administration, de la Fédération, des Etats, des collectivités locales, ont été dans une proportion remarquablement constante du PIB durant les 30 dernières années, en dépit des nombreux changements significatifs intervenus dans les structures fiscales de la Fédération et des Etats » (ibid., p. 79).

Évidemment, Si les recettes fiscales constituent une part constante du PIB pendant cette période, on couvre également les années Reagan. De plus, Si les revenus fiscaux pendant les années Reagan représentent une part constante du PIB, les baisses des taux n'ont pas affecté les recettes en valeur relative du PIB. Cet effet PIB est certes mieux connu sous le nom d'« effet Hauser », du nom d'un économiste de San Francisco Kurt Hauser. Par conséquent, la baisse des taux réalisée sous l'administration Reagan ne peut être la cause de la hausse de la dette publique, sauf à démontrer - bien entendu - que cette baisse des taux aurait entraîné une baisse du taux de croissance du PIB.

Concernant la croissance, la page 66 du rapport au Président établit que les années Reagan de réduction fiscale ont été celles d'une expansion dont la longueur a été la deuxième de toute la période de l'après-Seconde Guerre mondiale - 92 mois, entre 1982 et 1990. De même dans les données en annexe du Rapport au Président, le Conseil indique que le taux de croissance annuel moyen du PIB pendant les années Reagan a été de 3,94 %. Cette performance en matière de croissance est incroyable sur la base de quelque critère que ce soit. Alors dans de telles conditions quel a été l'argument qui a permis aux Conseillers du Président de démolir les réductions d'impôts de Reagan et leurs conséquences ? À vrai dire il n'y en a pas.

Les économistes du Président Clinton sont tellement obsédés notre égard qu'ils commencent à baver à la seule mention du nom de Reagan, la seule évocation du boum économique des années quatre-vingt et de la courbe de Laffer. Mais ne nous laissons pas impressionner par de telles pulsions émotionnelles. Nous pouvons nous concentrer sur le problème de la portée réelle de la courbe de Laffer sur l'économie américaine pendant les années quatre-vingt, d'une façon plus posée.

Pour commencer, nous devrions nous attarder sur les effets que les baisses d'impôts de Reagan ont eus sur les recettes fiscales en elles-mêmes, et spécialement sur la proportion entre recettes fiscales et PIB. En gros, les recettes fiscales en proportion du PIB représenteraient un tout petit peu moins de 30 % en 1982. En 1989 elles étaient un tout petit peu plus de 30 % du PIB. On ne peut en aucun cas assimiler la baisse des impôts une baisse des revenus fiscaux en proportion du PIB. Quand les Conseillers de Clinton proclament que la baisse fiscale de Reagan a été la cause d'une baisse des revenus, c'est tout simplement faux.

Mais l'histoire n'en finit pas l. Certains d'entre nous, dans la profession d'économiste. Soutiendraient que des taux marginaux d'imposition plus faibles - même quand le taux moyen d'imposition ne change pas - entraîneront par eux-mêmes plus de croissance économique. C'est clairement ce qui s'est produit pendant les années Reagan. Pendant cette période que Robert Bartley du Wall Street Journal qualifie de Sept années de vaches grasses le produit réel a augmenté de 3,94 % par an.

L'emploi total aux USA a augmenté de presque 18 millions d'emplois de 1982 à 1989. Le taux de chômage est tombé de 9,7 % en 1982 à 5,3 % en 1989. et la Bourse (évaluée par le Dow Jones) a presque triplé, passant de 884 points en 1982 à 2 509 en 1989.

La croissance pendant ces Sept années de vaches grasses n'a été dépassée (en termes réels) que pendant le premier semestre 1960 (avec 4,08 %) et le deuxième semestre 1960 (avec 4,62 %). Mais même ici il y a quelque ironie. Parce que ces périodes de très haut taux de croissance de l'ère Kennedy ont été associées des réductions d'impôts proportionnellement plus importantes que ce que l'on a vécu pendant les années Reagan de 1980. De plus, le déficit budgétaire sous Kennedy comme sous Reagan s'est énormément réduit sous l'effet d'une augmentation exponentielle des rentrées fiscales. Tout compte fait, l'ère Kennedy aurait d prouver quelque chose aux économistes de Clinton. Mais visiblement ce n'a pas été le cas.

Le premier semestre 1970 fut caractérisé par un taux de croissance réel annuel de 2,8 %, alors que le second semestre apportait une croissance de 3,56 % - Le premier semestre 1990 a vu une croissance réelle annuelle moyenne au taux de 1,74 %. À tout prendre, les années Reagan semblent plutôt bonnes Si on les apprécie en termes de croissance économique.

En rassemblant les deux éléments de l'équation, les réductions fiscales de Reagan ont augmenté les recettes fiscales au-delà de ce qu'elles auraient été différemment.

Là où les réductions d'impôts de l'ère Reagan ont été les plus généreuses, ce fut pour les tranches supérieures d'imposition. Et c'est pourtant cette classe de contribuables qui a fourni le plus clair de la hausse des rentrées fiscales. De 1981 à 1988 la part dans tous les impôts de ce qu'auront payé les 1 % des contribuables aux revenus les plus élevés a augmenté chaque année d'un minimum de 17,89 % à 27,58 %. Si cela n'est pas la preuve de l'impact décourageant de la courbe de Laffer, je m'appelle Bob Reich !

Mais même les commentaires erronés des auteurs du Rapport économique au Président dans leur propre contexte ne sont pas corroborés par les faits. Ils ne peuvent pas donner la réponse juste puisqu'ils posent la mauvaise question.

En 1989, le dernier budget de Reagan a été caractérisé par un déficit budgétaire global de 18.1 milliards de $. Cela a été le plus faible déficit de 1982 à nos jours. 1988 a été l'année du deuxième plus faible déficit, et 1987 du troisième. Une fois que les baisses fiscales de Reagan ont pris effet, le déficit budgétaire des États-Unis a été mis sur une trajectoire descendante, seulement brisée par une résurgence due à l'accroissement des impôts par George Bush. Allez chercher ! Le Comité des conseillers économiques de Clinton serait un désert pour Diogène et sa lanterne.

Comptabilité du déficit

Sans entrer dans des détails de technique comptable il est lamentable de voir avec quelle légèreté des soi-disant économistes traitent les données statistiques. Les économistes ne sont jamais aussi superficiels que lorsqu'ils parlent des déficits publics et de la dette. Pourtant ils devraient faire preuve de prudence, puisque l'information est facilement disponible pour tous ceux qui veulent bien s'intéresser avec un esprit de précision. Par exemple, le Professeur Robert Eisner a construit sa carrière fort honorable sur une partie de ses travaux sur ce sujet. Il est non seulement professeur titulaire de chaire à l'Université de Northwestern mais il a également été le Président de l'American Economic Association. Ces problèmes étaient l'objet de son discours en tant que président de l'AEA.

Comptabilité courante ou consolidée ?

Le gouvernement fédéral américain est à ma connaissance la seule entité qui, dans ses documents comptables, enregistre en dépenses toute la valeur de son capital dans l'année où il a été acheté. Mais les administrations au niveau local et des Etats ont des budgets en capital séparés pour les acquisitions d'actifs, et la plupart des entreprises sont obligées par la loi de capitaliser un certain nombre de leurs dépenses et de les amortir sur une période plus ou moins longue. Le Plan comptable (Generally accepted accounting practices, GAPP) précise les règles d'amortissement.

Je ne cherche pas à proposer un document comptable inhabituel, comme celui qui consisterait à capitaliser toutes les dépenses de défense engagées par Reagan dans les années 80, et qui seraient ensuite amorties sur toute la durée de vie, c'est-à-dire sur toutes les années où mes enfants et petits-enfants bénéficieront de la défaite de l'Union soviétique. Pourtant une telle proposition pourrait être faite, et serait probablement justifiée.

Dans le budget des États-Unis il y a une annexe qui peut permettre une correction et introduire une comptabilité consolidée. Cette correction capitalise à la virgule près ce qui devrait être capitalisé, et indique la dépréciation des capitalisations passées. Si la comptabilité avait été bien faite le déficit des années Reagan aurait été réduit de quelque 200 milliards de $ pour l'année fiscale 1989. Pourtant ces données n'apparaissent nulle part dans le Rapport au Président, bien qu'elles soient très tangibles dans tous les sens du terme.

Inflation et dette publique

L'inflation réduit la valeur réelle de la dette exprimée en $, ce qui est le cas presque normal pour la dette des administrations fédérales, étatiques et locales. Si l'inflation constitue un vrai choc pour les marchés, un système de comptabilité devrait considérer la réduction de la valeur réelle de la dette comme un impôt d'inflation et enregistrer ce montant comme une véritable recette. Si au contraire les marchés ont anticipé l'inflation, le taux d'intérêt devraient s'ajuster complètement et réduire la valeur de la dette, et la réduction de la valeur réelle de la dette devrait être assimilée à une réduction du principal, de même que le service des intérêts de la dette serait réduit de ce montant.

Quoi qu'il en soit, la réduction de la valeur réelle de la dette publique selon des systèmes de comptabilité courants devrait être déduite des déficits. Durant l'année fiscale 1989, nous avons connu de très faibles taux d'inflation (environ 4 % annuels) et la dette fédérale moyenne portée par les investisseurs privés représentait environ 1 500 milliards. En combinant ces deux éléments on peut considérer que l'inflation a réduit la valeur réelle de la dette de 60 milliards de $, et le déficit devrait être réduit du même montant. Encore une fois, on constate que cet élément n'est jamais mentionné - ne serait-ce qu'en passant.

Appréciation des actifs des administrations

Pendant les années 80 la valeur des terrains a augmenté en termes réels et nominaux. Le gouvernement fédéral détient près de 6,25 millions de kilomètres carrés de terres, et pourtant cette énorme plus-value en valeur nette n est jamais parue nulle part dans les données sur les déficits. La plus-value des autres actifs n'a jamais été enregistrée non plus, pourtant les sommes sont considérables. Ici encore, c'est la loi du silence.

Réduction des engagements fédéraux non garantis

Grâce à un énorme accroissement du produit et de la productivité au cours des années 80, à l'augmentation simultanée de l'emploi et des cotisations sociales, à la réduction des paiements effectués par la Sécurité sociale, le montant de l'engagement fédéral pour les dépenses de Sécurité sociale a diminué. Pourtant, comme pour la dette publique, cette réduction d'engagement n'a pas été enregistrée dans les données sur le déficit. Ce montant était pourtant extrêmement élevé.

Je pourrais poursuivre ainsi et prendre en compte les plus-values réalisées par les Etats et les collectivités locales, ainsi que les réductions en termes réels de leur endettement net grâce à l'inflation, etc. mais il n'y a aucune raison de s'attendre à un traitement plus honnête dans ces domaines. Qu'il suffise de dire que les déficits de Reagan sont réellement le fruit de l'imagination des économistes. Ma prédiction est que Si l'on avait procédé à une comptabilité correcte des actifs dans les années 80, l'administration Reagan aurait eu de loin les déficits les plus faibles des administrations américaines de ce siècle. Le jugement émanant du Comité des conseillers économiques de l'administration Clinton à propos des années Reagan est tellement politicien et erroné qu'il en est embarrassant pour toute la profession.

Impôts, déficits, éviction et production

« La réduction du déficit est une tâche importante car les emprunts gouvernementaux ,destinés à financer les déficits budgétaires accroissent les taux d'intérêt et ont un effet d'éviction sur les investissements productifs qui sont nécessaires l'accroissement de la productivité et de la croissance économique » (ibid., p. 41).

Ma carrière universitaire, à Yale puis à Stanford, m'a sans aucun doute exposé très largement aux thèses de Keynes et de la Théorie générale. La question qui n'a cessé de me harceler, Si l'on en vient à l'essentiel, est : « Comment peut-on augmenter le nombre de travailleurs en taxant le travail et en versant de l'argent à ceux qui ne travaillent pas ? » Une telle idée, d'une façon aussi dépouillée, est totalement absurde.

Mais Si l'on accepte des prémisses erronées, il n'y a malheureusement plus aucune limite au nombre de sottises que l'on peut « démontrer ». Un exemple particulièrement savoureux de raisonnement réputé brillant est fourni par cette réflexion du Comité de Clinton, qui avait pour but de légitimer les hausses d'impôts de Clinton en 1993. Le raisonnement est à peu près le suivant : une hausse des impôts a pour effets a) de réduire le déficit (désépargne gouvernementale) ce qui permettra b) de réduire les effets d'éviction et donc c) d'accroître l'épargne disponible pour la formation du capital privé, cela entraînant d) une chute des taux d'intérêt et donc e) une augmentation de la production d'investissements et de l'emploi. De telles contorsions pour démontrer qu'un accroissement des impôts sur la production à entraîne réellement une hausse de cette production appartiennent au pain quotidien d'une profession qui a perdu tout bon sens. C'est précisément ce que suggère la citation ci-dessus. Qu'on la tourne d'une façon ou d'une autre, Si le gouvernement taxe les individus qui travaillent et paient ceux qui ne travaillent pas, il y aura moins d'individus au travail et plus d'individus sans travail.

Taux d'intérêt réels

« Le niveau élevé des taux d'intérêt réels qui a résulté de la profusion des déficits et de la rigueur monétaire au début des années 80 a été en grande partie responsable du détournement de la composition du produit au détriment de l'investissement fixe " (ibid., p. 44).
Dans une économie fermée, la somme totale de tous les emprunts doit être exactement égale la somme de tous les prêts. Les activités de prêts et emprunts forment un jeu à somme nulle, où le solde est toujours nul. Cette contrainte globale est justement ce qui rend le marché de la dette Si fascinant et Si stratégique.

A la marge, la maximisation du profit fait que les agents privés emprunteront jusqu' ce que le cot de l'emprunt soit juste égal au rendement espéré de l'investissement. De la même manière, les prêteurs accorderont des prêts tant que le rendement des prêts sera supérieur ou égal au rendement qu'ils attendent d'autres occasions d'investir. Ainsi, en confrontant emprunteurs et prêteurs sur un marché unique, on n'est pas tout à fait certain que la structure temporelle des taux d'intérêt nominaux sera le reflet exact des anticipations collectives du marché concernant les rendements nominaux des actifs réels. Parallèlement, les taux d'intérêt réels sont exactement égaux aux rendements réels sur le capital investi qu'anticipe le marché.

Des rendements réels élevés, qui correspondent à des taux d'intérêt réel élevés ne « détournent pas la composition du produit aux dépens de l'investissement fixe ". C'est tout à fait le contraire. Lorsque la production marginale du capital est élevée, et que les « instincts bestiaux " (animal spirit) décrits par Joan Robinson se réveillent (parce que les entrepreneurs sont optimistes), des taux d'intérêt réels sont offerts pour récompenser les épargnants qui veulent bien alimenter le réservoir des fonds prêtables. Des taux d'intérêt réels élevés constituent et non pas réduisent la condition sine qua non pour une bonne politique fiscale et une véritable croissance économique.

C'est grâce à la baisse des impôts décidée par Reagan et à la saine politique monétaire menée par le FED que les années 80 ont connu un élan vers la croissance et vers des rendements élevés pour le capital. La nation a alors connu des taux d'intérêt réels élevés. Des taux élevés sont en général signes de bonne santé économique pour une nation.

Epargne et investissement

« Les effets sur l'investissement d'un accroissement probable du déficit budgétaire auraient été moins marqués si l'épargne privée, au cours de cette période, avait augmenté de façon compenser la baisse de l'épargne publique. Mais, au lieu de cela, la part de l'épargne des ménages et des entreprises dans le PIB a baissé dans les années 80, amplifiant les effets du déficit sur les taux d'intérêt et donc sur l'investissement » (ibid., p. 44).

Dans le domaine de l'épargne et de l'investissement, le Comité des Conseillers économiques du Président Clinton est victime de la comptabilité keynésienne, doublée de la « parabolaphobie » (un terme inventé par Wanniski pour désigner une peur obsessionnelle de la courbe de Laffer). D'après les keynésiens modernes, l'épargne nationale se définit comme la différence entre Revenu national et Consommation nationale, tandis que l'investissement privé est composé de l'épargne à laquelle il faut ajouter les rentrées nettes de capitaux étrangers.

La vérité est que l'épargne fut extraordinairement élevée au cours des années 80 - le taux d'épargne pratiquement le plus élevé que notre nation ait connu. L'erreur commise par les Conseillers vient du fait qu'ils prennent la perspective keynésienne sur l'épargne à l'envers.

John Maynard Keynes avait établi d'une façon très claire dans sa Théorie générale que ce qui l'intéressait était la croissance de court terme, et non la croissance potentielle. Dans une perspective de court terme, la demande globale est déterminante tandis que l'investissement, dont la rentabilité n'entre pas en ligne de compte, n'est qu'une composante de la demande globale. Mais les investissements mal orientés, même s'ils augmentent la demande globale, n'augmentent en rien le potentiel de croissance d'une nation. Ce qui importe pour la croissance, c'est la valeur productive du stock de capital existant, et non les sacrifices que la société a d consentir pour constituer ce stock. Dans la perspective d'un accroissement de la production potentielle, la mesure appropriée du stock de capital d'un pays est donnée par la valeur marchande de tous les actifs productifs. Le marché des actions donne une bonne idée de la valeur future du stock de capital d'une nation.
Il n'y a aucune raison de penser que tout capital, quel que soit le moment, soit également productif. C'est faux. De même il n'y a aucune raison de supposer que tout le capital d'un pays est utilisé de la meilleure façon possible. Cela n'est presque jamais le cas. Le concept d'épargne approprié à une étude de la croissance potentielle n'est autre que l'accroissement net de richesses dans la société. Les Conseillers économiques du Président voudraient à tort nous faire croire que la production d'une machine qui ne servira jamais constitue un « investissement », ou encore que trouver une utilité à une machine jusque-là jugée obsolète n'est pas un investissement.

Faisant toujours la même erreur, mais dans un contexte différent, ils voudraient nous faire croire qu'un individu qui consomme son revenu alors que sa richesse s'accroît en termes réels n'épargne pas. Pour les économistes de Clinton, un individu qui consomme moins que son revenu ne peut faire faillite. Ils ne comprennent pas la logique économique, mais cela les irrite.

Au cours des années 70, les ménages et les entreprises ont investi dans des refuges anti-impôts, anti-inflation, anti-réglementation et ont dilapidé le capital de notre nation. Dans les années 80, nous avons orienté le capital de la nation vers un usage productif, grâce aux réductions d'impôts et au contrôle de l'inflation. Le capital de notre pays a été orienté vers des initiatives productives. De ce fait, on a eu une hausse sans précédent de la valeur des actifs nationaux dans leur estimation par les marchés. En dépit de toutes les évidences qui vont en sens inverse, le Comité économique du Président semble encore regretter que nous n'ayons pas doublé la masse des « mal-investissements ».

Pendant la période 1983-1989 l'accroissement de la richesse fut énorme en Amérique. La richesse nette de la famille américaine s'est élevée nettement. Des fonds de pension qui assurent les revenus futurs des travailleurs américains ont augmenté comme jamais auparavant, et la valeur moyenne des logements américains a elle aussi fortement augmenté. Plus de 18 millions d'emplois nouveaux ont été créés, l'amélioration des conditions économiques pour une famille noire américaine a été en moyenne supérieure à celle qu'ont connue les familles de Blancs américains. Durant ces Sept années de vaches grasses les taux d'activité et de salaires des femmes ont augmenté relativement à ceux des hommes. Je ne comprends pas comment un économiste peut avoir une attitude globalement critique à l'égard de cette période.

Mis sur intenet par l'ami du laissez-faire.